Depuis que nous sommes arrivés à San Martino, il semble inconcevable de quitter l'endroit sans avoir pu gravir le magnifique pilier de la Pala: les 600m du Pilastro rougissent chaque soir (enfin quand il n'y a pas d'orage) et assurent le spectacle depuis le camping à l'heure de l'apéro.
La météo qui, jusqu'à présent, était chaude et orageuse (à Grenoble, c'est la canicule) annonce un tournant, une première offensive automnale avec une courte perturbation et surtout un refroidissement qui va faire chuter l'iso 0 de 4300m à 2500m. Dès la soirée le temps est annoncé limpide. Les belles lumières seront au rendez-vous et le risque orageux sera écarté. Parfait pour être bien serein dans la voie!
Nous profitons donc de la journée perturbée pour monter au refuge Pedrotti.C'est pas trop violent: on prend la benne et à sa sortie on redescend 10 minutes à pied avant de se mettre au chaud dans ce qui est un véritable hôtel d'altitude. L'après midi se passe tranquillement entre sieste sous la couette (dans un dortoir de 6 ou nous ne sommes que deux...) et bouquinage féroce des "skialper" (magazines entièrement dévolu au ski-alpinisme dans lesquels on peut par exemple trouver 5 doubles pages comparatives entre la conversion italienne et la conversion Brosse-Gignoux (véridique!!), et des comptes rendu de chaque course de ski-alpinisme avec plus de précision que l'Equipe n'en donnerait pour une grande étape pyrénéenne du Tour de France! Dément!)
Le soir, l'orage s'éloigne et l'on va faire un tour dans ce paysage lunaire qui a, parait-il, inspiré Dino Buzzati pour son "désert des tartares". On en prends plein les mirettes et on fait les cakes:
Du sommet de la Rosetta, on est aux premières loges pour mater à la fois la Cima Val di Roda (à droite) et la Pala. Comme dit Karo, on s'est chié: après les 700m du premier, on aurait quand même pu enchainer avec les 600m du second!
Derniers feux sur la Cimon
Il va être l'heure de se préparer pour le lendemain et de rejoindre les couettes.
Le lendemain...
Le topo du site Quarto Grado indique de 7 à 9h pour 870m d'escalade (et 650 de D+). Bon il faudra aller un peu plus vite si on souhaite pouvoir chopper la dernière benne (16h50) et pas se farcir 1200m supplémentaires à pied. En fait on a tellement bien dormi au refuge qu'on se dit que si on loupe la benne, on y restera encore une nuit. Cela enlève toute pression niveau timing. On décolle donc du refuge à 7h30 pour une bonne heure d'approche globalement descendante:2 petits degrés au petit matin, autant dire que l'on a toutes nos couches sur nous!
Une fois de plus, la difficulté (et le plaisir) ne seront pas tant dans la technicité de la voie (du IV+) que dans la recherche d'itinéraire et dans le bon compromis entre sécurité et rapidité
Dans le socle, on rejoint en 2 longueurs le R4 du topo en attaquant plus directement. (c'est d'ailleurs ce qui est conseillé dans d'autres topos):
Cherchez Charlie:
Une belle cheminée de 200m fait suite.
Le Sass Maor et sa Face Est: pas de problème, ça doit baser!
Sortie des difficultés
Et hop, 4h40 après l'attaque on est au sommet. Escalade plaisante, bon rocher, pas de guenillage d'itinéraire: ca a bien déroulé!
En fait le plus inquiétant semble être cette descente. Cela parait anodin car le plateau n'est que 300m plus bas, mais en fait, il y a 5 gendarmes à contourner ou à grimper. Les marques rouges censées indiquer la descente, se font surtout remarquer par leur absence lorsque 2 options se présentent...
Après une progression assez... méticuleuse (et un rappel, qui doit pouvoir s'éviter en désescaladant du III+/IV impressionnant), on atteint le plateau.
Le sommet et les gendarmes que l'on devine plus ou moins.
Pas mécontents d'arriver à non port... Karo a trouvé la descente au final bien plus technique que la montée.
Au final, on aura bien de la marge pour la benne et on enchainera avec la route qui nous conduira à Misurina, au pied des célébrissimes Tre Cime... Mais ceci est une autre histoire